Médecine douce… vraiment ?

Je viens de tomber sur une pub pour une mutuelle. On y voit une femme avec des aiguilles d’acupuncture sur le visage, l’air perplexe puis détendu et la voix off qui parle de « médecine douce ».

« Médecines douces », une expression séduisante, rassurante, presque poétique.

Que suggère « médecine douce », sinon une médecine secondaire, alternative, complémentaire… mais pas centrale ? En un mot : une médecine diminuée.

« Médecine douce » : un mot qui n’est pas neutre.

Le terme « douce » évoque la bienveillance, la naturalité, l’absence de danger. Mais il installe en même temps une hiérarchie implicite :

d’un côté, la « médecine » tout court → autorité, science, rigueur, hôpital, diplômes.

de l’autre, la « médecine douce » → rassurante, naturelle, mais perçue comme moins sérieuse, moins légitime.

Le vocabulaire, ici, ne se contente pas de décrire. Il classe. Et il réduit.

En Chine, la médecine chinoise est enseignée à l’université, pratiquée dans les hôpitaux, encadrée par l’État. Elle n’est pas considérée comme une alternative mais comme une branche médicale à part entière, au même titre que la chirurgie ou la pharmacologie.

En France, le statut change radicalement. On la range dans la catégorie des « médecines douces », aux côtés de la sophrologie, de l’homéopathie ou de l’aromathérapie. On la réduit à un rôle de confort, presque décoratif.

Un seul mot suffit à la déclasser.

Pour le grand public : « douce » entretient une illusion d’inoffensivité. On croit que ces pratiques sont sans danger. Pourtant, même les médecines dites douces peuvent comporter des risques (effets secondaires, erreurs de pratique, dérives).

Pour les institutions : l’utilisation de ce terme permet de répondre à la demande sans accorder une reconnaissance pleine et entière. Ça permet aussi aux mutuelles, comme ici, de proposer des forfaits « médecines douces » pour séduire leurs assurés, tout en maintenant ces pratiques dans un statut inférieur.

Symboliquement ça perpétue une hiérarchie. La médecine occidentale est « sérieuse » et « centrale ». Les autres sont « douces », donc secondaires.

Appeler acupuncture et médecine chinoise des « médecines douces » n’est pas un simple choix de mots. C’est une manière subtile de les reléguer à la marge. Derrière un adjectif apparemment bienveillant se joue une véritable politique du langage.

Et peut-être est-il temps de rappeler que l’acupuncture et la médecine chinoise dans son ensemble, ne sont pas une « médecine douce » mais simplement de la médecine.

Bon Qi !
Fatah 🐉

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